Je
regarde la sélection des photographies des feuilles sur les sols faites
ces derniers jours. Une dispersion au gré des circonstances,
démocratique, chaque élément à sa place et importance dans la
composition. La perspective est abolie dans ce plan frontal du sol, le
regard est incité à se déplacer continuellement d'un élément à un
autre. Comme dans mes dessins ou dans d'autres séries de photographies,
je pense aux Désordres par exemple. Je recueille sans doute ici
l'expérience de la composition sur une feuille de papier. Nature
contrariée par le macadam des hommes, sa beauté miraculeuse sur cette
surface non réceptive, uniforme et stérile dans son refus d'intégrer le
cycle de dégradation vivant de ces feuilles. La pesanteur et la grâce,
et le macadam. Images faites dans l'environnement proche, pas de
déplacements particulier, bilan carbone, l'obsession du moment, réduit
à la subsistance. Le monde va mal, la crise climatique, la guerre, la
famine et tous les autres malheurs de ce monde nous sont chaque jour
rappelés et nous accablent, cependant l'automne arrive, les feuilles
tombent, je mange, je vis, je passe du temps à chercher ces images que
je sélectionne avec le plus grand soin. Dérisoire? Wozu Dichter in
dürftiger Zeit?